Le régiment a donc cheminé sur les routes de France en cet automne 1939. Les Ardennes nous accueillent pour cet hiver 1939-1940.
Les paysans qui nous hébergent sont très sympathiques. Il faut dire que ces régions ont subies de gros dégats et traumatismes au cours du premier conflit mondial.
Nous couchons avec les chevaux dans les granges sur la paille ou le foin.
Le ravitaillement est correct et le courrier arrive normalement.
Il fait froid en cet hiver, mais pas d'ennemi en vue. Nous nous occupons entre camarades après avoir soigné les chevaux et fait quelques exercices.
Ainsi va la vie, avec peu de nouvelles du front jusqu'au mois de mai, et là branle bas de combat!
On dort dans les granges, avec nos chevaux. Le ravitaillement suivait normalement ainsi que le courrier et les mandats envoyés par la famille aux prix de sacrifices, mais qui amélioraient bien l'ordinaire.
Nous passions le temps en manoeuvres, prises de position, soins aux chevaux et équipements, dont les armes dont il ne fallait pas se séparer. J'avais le fusil mitrailleur qui n'est pas l'arme la plus légère à transporter en chevauchant!
Direction la Belgique où l'ennemi avancerait.
Le 10 mai c'est l'attaque allemande.
Nous voyons passer les avions marqués de la croix noire, quelques chasseurs français ou anglais s'interposent. Nous sommes spectateurs. Néanmoins on entend le bruit du canon.
Cette fois c'est sérieux.
Nous sommes en Belgique ce 10 mai.
Une fois de plus ce petit pays est foulé par les bottes allemandes!
Nous avançons avec nos chevaux sur les chemins et dans la forêt. Nous faisons plusieurs bivouacs. On nous dit que l'ennemi est proche. Nous avons reculé et repassé la frontière en évitant les colonnes allemandes que l'on devine.
Nous entendons toujours le bruit des combats qui sont proches.
Les avions passent au dessus de nos têtes par vagues. Ces stukas qui feront tant de victimes dans les rangs des armées mais aussi dans les colonnes de civils qui fuient les zones de combat: l'exode. Ca nous ne le saurons qu'à notre retour...
Nous sommes déployés de part et d'autre d'un chemin dans la forêt."
On nous demande de prendre position, pieds à terre. Nous entendons des moteurs. Ce sont des chars! le colonel Rey nous dit" on ne se rend pas, on se defend, plutôt mourir que se rendre, l'armée française ne se rend pas, c'est un déshonneur".
Pauvres de nous avec nos chevaux!
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Un tir de mitrailleuse fauche 14 des nos camarades et une vingtaine sont blessés.
Je me réfugie dans une cabane Un camarade voir la tourelle du char tourner vers cette cabane et me crie "sort de là!". Je plonge au dehors dans un buisson au moment même où l'obus fait exploser la cabane.
Notre officier décide de se rendre. Il nous demande de jeter nos armes et d'avancer les mains en l'air.
Les allemands prennent nos armes et nous regroupent. Ils nous fouillent à corps. J'éprouve un sentiment étrange de gâchis de n'avoir rien pu faire, mais aussi de soulagement d'être en vie.
Nos chevaux (280) pour le régiment iront grossir le ravitaillement allemand....
Nous sommes à Avesnes le Sec. C'est là qu'est née la mère du camarade qui m'a sauvé la vie, Emile.
C'était le 17 mai 1940.
Prisonnier, oui je suis prisonnier.
Mais quel désastre, les allemands nous regroupent. Nous sommes des centaines puis des milliers.
A croire que l'armée française est là entière entre les mains des "chleus" comme nous disions.
Il nous restait un peu de nourriture dans le sac à dos.
J'ai pu adresser une lettre à mes Parents, mais avec la censure on ne peut tout dire.
Mais pas le temps de se poser beaucoup de question, les allemands continuent d'avancer et nous sommes pris en charge par des troupes qui regroupent les prisonniers. On voit des uniformes de tous les régiments et de toutes les armes.
Dans le ciel que des avions allemands. Où sont passés les nôtres ?
Le 22 juin 1940, nous apprendront que la France a signé l'armistice à Rethondes, dans le même wagon où avait été signée la capitulation allemande en 1918.....
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La longue colonne de prisonniers - je n'en vois ni le début ni la fin- avance sous les hurlements des soldats allemands, nos geôliers.
Si un de nous retarde un peu, coup de pied, coup de crosse, pas de pitié pour les faibles, il faut avancer coûte que coûte, tenir, tenir, serrer les dents. Si un s'écroule, il est trainé à l'écart et nous entendons une salve. Un de moins disions nous. Ca aide à avancer, la trouille de ne pouvoir suivre.
Nous marchons un vingtaine de kilomètres par jour. En 5 jours nous arrivons à Trèves. La nuit, nous couchons à la belle étoile, dans les prés, sur les rebords des fossés, sans nourriture aucune. On mange ce qu'on trouve dans les champs: le blé n'est pas mûr, mais nous grignotons les épis ou de des herbes. Pour boire rien, de l'eau dans les mares à même le sol, ou dans des dossés.
Et la dysenterie commence à faire ses effets. Mais pas le temps de s'arrêter longtemps, il faut réintégrer la file, avec en prime un coup de baïonnette dans les fesses.
Parfois un de nous d'écartait du chemin pour pénétrer dans une maison - toutes abandonnes - et essayer de trouver quelques chose à manger. Là les risques étaient grands pour peu de résultats .
Un jour des avions allemands nous ont survolé et lancé quelques boules de pain de seigle. Mon copain Emile en a attrapé une et à l'arrêt suivant nous nos la sommes partagée entre un groupe de six du régiment. Malheureusement peu ont eu droit à cette nourriture tombée du ciel.
Et il faut suivre, suivre, coûte que coûte, les plus forts aident les autres.
On arrive dans un camp. Trêves. Nous dormons à la belle étoile. Les officiers et les hommes de troupe sont séparés.
Des points d'eau, mais pas de nourriture.
On reste 3 jours à Trèves puis on nous emmène à la gare. La faim tenaille.
Des trains avec des wagons à bestiaux attendent. Nous montons dans les wagons, 70 par wagon, sans nourriture, sans boisson, sans sanitaire ...
Nous resterons ainsi 3 jours et 3 nuits, pendant que le train roule. Impossible de s'allonger, l'odeur est insupportable et ce n'est pas le peu d'air qui arrive par les petites ouvertures qui y change quelque chose.
La faim, la soif, terrible!
A voir la position du soleil on se rend compte que l'on se dirige vers l'est.
On passe Vienne. On est en Autriche se dit-on dans le wagon.
Enfin le train s'arrête et on ouvre les portes. Hébétés nous descendons. On est dans un camp et il y a là, déjà des milliers de prisonniers.
J'appends que nous sommes à la frontière tchécoslovaque. C'est un camp de transit.
On nous trie et on nous donne un matricule. Le mien: 73907.
Et puis de l'eau de la bonne eau de la vraie! Quel régal. Et de la nourriture: une gamelle de pommes de terre non épluchées et germées. Mais qu'importe, c'est un festin! Comment nous devenons dépendants de nos geôliers!
Dans ce camp nous passerons un mois et demi. On nous donne une plaque de métal blanc portant notre numéro matricule à porter au cou jour et nuit. On est pris en photo également. Tous les jours, matin et soir , rassemblement, appel.
Nous dormons dans des baraques en bois sur les lits superposés (2) avec pour tout matelas des planches et pour couverture notre capote. Heureusement la saison n'est pas froide.
Depuis notre départ des Ardennes, nous sommes restés avec les mêmes vêtements. Les poux sont partout.
On nous prend le linge qui va être mis dans des chambres à gaz pour être désinfectés et nous prenons une douche!
Après on peut laver notre linge et le faire sécher à même le sol, mais il faut surveiller: les vols. De même la nuit, il me faut regrouper le maigre barda et surtout les chaussures, car les vols sont fréquents
On nous dit que nous allons travailler et qu'il faut que nous soyons en état en arrivant. Où ? Mystère.
De nouveau dans le train, mais le trajet est court une journée. Nous arrivons en gare de Friesach, en Carinthie, non loin de Graz et près de la frontière italienne.
C'est une région de montagnes, et nous nous dirigeons vers le village de San Salvator, dans la montagne où sera notre stalag.
Heureusement avec quatre autres camarades du régiment nous restons groupés: Emile, Louis, Roger, Lucien.